29 juin 2017

L'activité du Reventador (Equateur) en hausse depuis quelques jours

L'IGEPN a publié le 26 juin un rapport concernant une mission effectuée sur le terrain par les volcanologues entre le 29 mai et le 01 juin, suivie d'un survol le 07 juin, qui permet de faire le point concernant l'activité sur ce volcan. En effet, depuis longtemps maintenant le suivi quotidien via les webcams est devenu impossible car elles ne sont plus directement en ligne : l'IGEPN propos des gif produits automatiquement à partir des images les plus récentes. Et le suivi via les satellites est extrêmement difficile et hasardeux du fait d'une couverture nuageuse importante et, pour ainsi dire, permanente.

Au cours de ces quelques jours, les volcanologues ont tout d'abord pu constater que l'activité explosive reste assez soutenue. Non pas que les explosions en elles-mêmes soient hyper violentes, mais elles sont relativement fortes et plutôt fréquentes, avec une toutes les 15 à 30 minutes en moyenne.

Le camp de base au pied ud versant nord-est du cône actif et l'activité explosive. Image: IGEPN


A la différence de la situation décrite en novembre 2016, les deux évents situés dans le "cratère"* sommital sont le siège de cette activité explosive. Certaines sont assez fortes pour générer des écoulements pyroclastiques qui, pour les plus importants, descendent jusqu'à la base du cône actif.

Explosion et écoulement pyroclastique associé, vu en infrarouge thermique. Image: IGEPN, extraite du rapport du 26 juin
Les volcanologues distinguent aussi d'autres écoulements pyroclastiques, plus faibles, moins mobiles, moins volumineux, qui sont dus au décrochement de portions instables des dépôts de cendres et bombes accumulées au sommet du cône.

En plus de cette activité explosive les volcanologues ont pu observer une très très faible effusion (coulée de lave) sur le flanc nord-est du cône. Elle trouvait sa source sous la lèvre, au niveau d'un troisième évent, dont on peut assez facilement noter, sur les images ci-dessous, qu'il n'est pas aligné avec les deux autres: à priori donc l'activité n'est pas contrôlée par un fracturation. Les bulletins les plus récents continent de décrire cette coulée de lave, qui mesure actuellement 2000m de long environ

Les trois évents, deux aux sommet (nord et sud) et le troisième d'où s'échappe une coulée, vue en infrarouge thermique. Image: IGEPN, extraite du rapport du 26 juin
Cette activité semble avoir connu un bref pic les 22 et 23 juin. Les volcanologues ont en effet pu observer tout au long de la nuit une succession d'écoulements pyroclastiques, dont les plus importants ont atteint 4 km de distance tout de même, suffisante pour potentiellement atteindre la zone où se trouvait le camp de base 3 semaines avant (la trajectoire des écoulements n'est, semble-t-il, pas passée par la zone du camp de base).
Cette crise a été accompagnée de l'émission d'un important et continu panache chargé en vapeur d'eau et la sismicité montrait la présence d'un trémor associé à la formation de ce panache, produit au niveau de l'évent sud d'après les images. Il semble que la partie supérieure du système d'alimentation se soit retrouvée pressurisée. Cette pression s'est libérée de manière plutôt tranquille (pas d'explosions violentes, pas de destruction du sommet du cône etc), ce qui est compatible avec le fait que les conduits soient bien "ouverts"** (= rien qui bloque les fluides, les mouvements de la colonne de magma, l'arrivée de magma neuf, etc)




Dans tout ce qui a été écrit plus haut il faut relever un point important, je pense:  sur l'image thermique qui montre la coulée de lave, prise le 07 juin, on voit très clairement qu'elle est très courte, quelques centaines de mètres tout au plus. Or le dernier bulletin (27 juin) indique qu'elle mesure actuellement 2000 m de long. Entre ces deux dates, il y a la crise évoquée ci-dessus (22-23 juin): ça m'étonnerais que le hasard ait sa place ici. La crise en question est à l'origine de la hausse du débit de l'effusion. De là on peut supposer que:

- la hausse de la sismicité et le démarrage de la crise sont liés à l'arrivée d'un magma plus chaud, plus fluide et plus riche en gaz, dans la partie supérieure de l'édifice.

- son arrivée à déstabilisé la partie supérieure du cône, au niveau de l'évent nord et/ou de l'évent effusif. Cela étant à l'origine de la séquence d'écoulement pyroclastiques, qui (on le voit nettement sur le film) ne sont pas liés à une forte activité explosive, mais plutôt à des effondrements, compatible avec l'élargissement de l'évent effusif.

- la coulée est passée de quelques centaines de mètres de long à 2000m de long en quelques jours (5 maximum): plutôt un gros débit pour les coulées "habituelles" au Reventador.

De tout cela on peut déduire que la crise débutée le 22-23 juin est toujours en cours. Les écoulements pyroclastiques ont cessé car la partie supérieure du cône s'est stabilisée, mais le magma neuf est toujours en cours d'effusion et produit la longue coulée.

Une situation à suivre.

Source : IGEPN

* je met des guillemets parce qu'un cratère est, par définition, un creux alors que le sommet du cône actif du Reventador est plutôt plat en ce moment.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire